[ LES AMOURS PARTAGÉS ]

FUITE TACITE. CHUTE TRAGIQUE.

[ MUSIQUE ] PLAYLIST DE L'HIVER

BOUCLE BOUCLÉE POUR CHAUSSURES MAL LACÉES | REAL LIES / HELENA HAUFF / PAULA TEMPLE / WHOMADEWHO / D.A.F. / KINDNESS

[ TEXTE ] LES AMOURS PARTAGÉS

L'INSOLUBILITÉ À L'EAU

[ MUSIQUE ] LA PLAYLIST DE L'ÉTÉ PASSÉ

IN AETERNAM VALE / GRAND BLANC / GAY CAT PARK / JESSICA93 / MARIE MADELEINE | [colonne musicale pour vertèbres déplacées]

[ RENCONTRE ] Fou amoureux de.. CLÉMENT.

"Vous croyez qu'on réalise ses rêves ?"

mardi 8 septembre 2015

[POP-UP 08/09/2015 ]

Passe le bonjour à l'inconnu. À mes migraines. Mes maux de coeur. Et toutes les blessures qu'on mène sans peur. Passe le bonsoir à l'imprévu. À celui qui me l'a prise. À celle qui m'la rendue. Aussi. La fêlure morose. Du dimanche un peu rance. Passe le bonjour à c'qui n'est plus. C'que j'ai pas vu. Dans l'coin d'la porte. Samedi dernier. J'avais prévu. Que peu importe, les yeux volés. OU c'était dimanche. Je pointe l'interrogation. Sur le nez de ce qui est. Et je demande. À arpenter. À maugréer. Sur l'échine basse des égarés. Je rumine. J'use le "JE". Je verbalise l'agression. J'agresse ma dentition. Et je MAJUSCULE. Je pointe. Tout court. Je suinte. Tout sourd. Et je maronne. Sur la colonne courbée d'un édenté. Évente moi donc. Baise moi le nez. Casse moi la dent. Je grince d'impatiente. Octobre approche. Range loin ta science. Septembre est loin. Évite moi. Sec ! Salis moi. Carré ! Je pointe l'interrogation. Sur les MAJUSCULES du jour d'après.

vendredi 7 août 2015

[ POP-UP ]

On m'a dit un jour "j'serais incapable de raconter c'que tu racontes dans tes textes". J'ai évidemment demandé pourquoi. On m'a parlé de pudeur, d'intime, de timidité, de choses privées. Je n'sais plus bien c'que j'ai répondu. Mais j'ai du évoquer la force de l'habitude, du besoin aussi, j'ai du prétexter l'envie, et le naturel de tout ça. Le fait que j'me pose sur papier depuis toute petite. Le côté sauvage de l'écriture semi-automatique. Le côté libératoire, exutoire, puis le côté flippant de c'qu'on peut écrire d'un trait, comme ça, sans vraiment trop réfléchir. L'excitation de se faire s'enchaîner des mots qui ne s'aiment pas trop, de se faire s'attacher les unes aux autres des idées contraires. Puis la fascination de son propre inconnu, bien caché, profond, là, bien calé à l'intérieur de son soi, pas toujours joignable, mais parfois admirable. Tellement admirable qu'on se prend à le rappeler souvent. Quand la peur frappe. Que l'intestin se tord. Et que le coeur se serre. Son Inconnu. Qui se pend alors de tout son long sur les murs et aux fenêtres. Dans l'embrasure des portes, à la sonnette. Son Inconnu, l'alarme qui fait fondre l'âme, l'arm[e] qui met d'un coup la larme à nue. Son Inconnu à soi. La plus douce chose au monde. Le joker salvateur. L'érection anti-terreur.
Francesca Woodman.

mardi 4 août 2015

[ FICTION ] RÉTRO-FUTUR DU SENTIMENT | NUIT DE LETTRES SANS ATTELLES

De A à S, 
en passant par J.


© Sara Imloul.


Les pages blanches. Et les milliers de mots qui taquinent sans fleurir. Qui font qu'tu penches. Une fois sur dix. Les mots qui viennent qu'à moitié. Qui étouffent sans gémir. Sèchent sans rien dire. Qui grimpent. Arpentent en silence. Le long des colonnes, de toute la hauteur des gorges sèches. Des sexes tendus. Puis des langues dépliées. Sans crier gare. Sans crier court. Les coeurs déliés. Le goût du vinaigre. Qui apparaît dans la lumière. Au fond du four. Sans une prière. Et les corps qui se délitent. Chut. Fallait rien dire. Mieux vaut la chute. Et les murs qui courent. Les murmures carapaces. La main rapace. Qui t'rattrape. Comme si de rien. Mais c'est rien, en fait, ma p'tite. C'est rien de rien. 
J't'aime. J't'aime profondément. Toi que j'frappe. Toujours, un peu, trop loin. Toujours, sûrement, du poing. Mais. C'est que j'sais pas faire moins. J'sais mettre que des points. À la fin d'tes mots à toi. À la fin d'mes sursauts à moi. Mais je t'aime sans l'dire. T'as vu, j'le dis même en entier. J'pourrais dessus r'passer sans qu'tu l'saches. Mais j'vais laisser là. La p'tite trace, la p'tite preuve, la p'tite enflure. Parce que c'est pure puis pas peu sûr. J't'entends déjà. Tu peux toujours en rire. Mais j'préfère pouvoir l'écrire. Plutôt que d'm'en bouffer la langue. Et d'm'en crever les yeux. Plutôt que d'avoir à chanter la rengaine. De la meuf qui parle trop. Mais ne dit jamais rien. Jamais rien d'bien. Jamais rien d'bien mûri. Mais qui flanche sans arrêt pour un rien. Un rien presque toujours trop sien.
J'pourrais te l'dire de loin. De plus loin qu'ici. De plus loin qu'le plus loin de tous les lointains. J'pourrais te l'crier à la gueule. Te l'hurler. À l'intérieur, c'est bien seul. J'pourrais t'attraper la barbe et t'insulter. Puis m'blottir dans tes bras. Et me poser. Et reposer. Parce que le chaud. Le tout doux. Et l'éternité dans un verre de 8.6. Les sourires qui m'triturent l'estomac. De penser à  vous. À toi. Puis à toi. À toi aussi. Comme dans l'refrain de l'autre connard. Comme dans les beaux mégas nanars. J'pourrais faire l'canard aussi. Juste pour vous r'mettre deux s'condes. Puis plus jamais vous oublier. Plus jamais vous échapper. La vision d'l'étrange. Comme dans un livre presque volée. Gardée à tout jamais. Conservée dans une p'tite larme qui rame. Contre les courants maudits. Contre la poitrine. Croix de coeur. Poing de fer. Fer conquis. Je ris. Non, en vrai j'souris. 
Puis avec des "si". J'pourrais te l'dire tous les jours que j't'aime. Avec des "si". J'pourrais tenter un "j'te jure". Que j'reste là. Que vraiment j'pars pas. Juste une fois, et cette fois sans injure(s). L'ami volage, sans dur futur. Voter pour, oui oui, tout court. Voter court, oui oui, tous pour.  Pour les amours un peu sourds. Qui arrachent la nuit. Tant qu't'as encore l'oeil qui luit. Quand tu m'sens pas loin, le visage contrit, le corps tendu, de n'pas pouvoir m'atteindre. Avec des "si". Par milliers. J'pourrais m'retrouver. Sans toujours avoir à feindre. Retrouver l'ivresse, dans ta folie que j'caresse. Puis dans le leste que j'détache. L'attache que j'te fixe. Au bout du nez. Juste pour rire. Parce que c'est toi. Et pas un autre. Juste pour toi. Pas pour une autre.
Mais j'ai qu'ma ptite larme qui m'rame dans les veines. Mes p'tites mains comme seule attèles. J'peux rester là. Écrire un "j'te jure". Frémir des "je t'aime". M'cacher les yeux. Bander l'poitrail et t'attraper la barbe. Pas sans injure, cette fois. Mais rester là. Pourvu qu'tu fonces. Dans l'tas. Pour moi. Et pas pour rien. Parce que j'suis là. Pour toi. Pas pour quelqu'un.


mardi 14 juillet 2015

[ pop-up ] de crâne / le seul truc qu'on aura jamais assez mérité.

J'ai écrit c'truc débile. Y'a quelque chose comme cinq ou six jours. Puis je l'ai effacé. En fait, en vrai, j'l'ai gardé. Au fond d'une poche. Parce qu'il était moche. Ce texte. grossier. Pas fameux. Un peu coulant. Pas très aimant. Ça pète de l'autre côté de la rue. Les voisins s'attendent. Se servent des cafés. Il est presque 23h. Et j'dis beaucoup trop "buter". 
Paraît qu'elle parle souvent d'la mort la p'tite. On m'a fait la réflexion, pas plus tard qu'hier. Et j'ai compris sans comprendre. J'ai donc répondu sans répondre. Articulé sans pour autant dire grand chose. Il n'y a rien à dire de la mort. Rien à dire de plus qu'en mentionner l'existence. Son côté "protubérance de crâne". Qui devrait déranger, mais dont on s'contente avec raison. Dont on s'ne soucie plus. À force.  Comme s'il était bon, en fait. D'garder en tête que rien n'est bien sérieux. La mort. La p'tites morts. Les p'tits départs. Les vrilles que l'on console. Ce point-virgule en trop, derrière lequel on s'complaît l'air de rien. L'air d'y comprendre rien. Ce point-virgule que l'on annote, au quotidien qui n'ressent rien. Un détail, un détail absolu. Sans mixité aucune. Mais à la relativité toute propre. Aux contours lisses. Sans ambiguité. Le seul truc qu'on aura jamais assez mérité.

mercredi 24 juin 2015

[ TEXTE ] RÉTRO-FUTUR DU SENTIMENT / 2287 #3

© Sonya Kyydeva.
[ parce que nous ne sommes d'ici, que pour là-bas, avant comme hier, des fantômes de ce qui sera, des ancêtres de ce qui a, un jour, été. Par ici comme par ailleurs, ton regard à travers l'opacité vaporeuse, comme un élixir de déjà-vu. Pour ici comme pour ailleurs, rien ne sera comme il a, un jour, été question de se retrouver. Tout s'enchaîne. Tout se fait suite. Inconsistance du temps qui passe. Tout se ressemble, et s'assemble dans nos dos décharnés. Tout se démembre. Le futur est dur. Et file plus vite qu'avant. Nos amours sont les mêmes. Fragiles. Immoraux. Sans limites. Absurdes. Sans réalité. Ni sécurité. Par ici comme par ailleurs, ton regard à travers l'opacité vaporeuse, comme un élixir de déjà-vu. ]

| lire le début : 2287 #1 | 2287 #2 |

"J'aurais voulu que tu meures dans mes bras". Ses mots me frappent d'un coup alors que je pousse la lourde porte du Silex. Le métal grince, et j'entends mon coeur, un peu plus bas, qui s'éteint encore un peu. Mon désir assassin, tranquille, me crie de faire marche arrière. Je la sais. Là-bas. Seule. Face à la fenêtre béante. Et à mes silences pendants. Je la sais silencieuse. Là, dans le brouillard de sa propre existence. Dans la fumée grise de son quotidien. À n'penser à rien. À rien d'autre qu'aux jours qui arrivent. Qui arrivent et qu'elle n'écrira pas. Je la sais là. Au dernier étage de sa tour sans fin. Impossible à libérer. Immobile derrière sa cigarette, transcendée par le vide, et les angoisses qui lui chantent dans l'estomac. Elle part un peu, déjà, alors que les secondes filent dans ma tête. Que mes pas me séparent de son ombre. Et que sa lumière s'égratigne, là, contre la surface vitreuse de l'oubli qu'elle étreint. Je ne la sens plus. Je la sais partie. Et la gerbe me secoue l'oesophage. Dans un coin, je m'épanche et je vide. Le trop-plein des silences malsains. Je ne la sens plus. Déjà. Mais je la sais partie. Entraînée par sa chute, le visage gonflé par les larmes, et mon coeur à la main. Moi aussi, j'aurais voulu pouvoir mourir dans ses bras. Moi aussi j'aurais pu sauter, tu sais.

Seule au comptoir, je fais claquer ma chevalière contre mon verre. Musique industrielle pour désirs cruels, je laisse mon regard s'attarder sur les corps sans noms que je perçois à peine. Sur la laideur de certains visages, auxquels j'aspire avec raison. Rien de tel que de baiser sans passion. Pour un jour sans chaleur. Célébrer l'oubli. Le futur malingre. Conquêtes secrètes que l'on épingle. Pour le jeu, et les tableaux noirs que l'on remplit. Pour le geste. Juste pour le Geste. Et se faire moins mal. Un peu moins mal, tant qu'on le peu. Baiser sans feu. Baisser les armes avec ardeur et faire semblant. Se croire heureux. Le temps d'écrire un peu soi même. Sur les tableaux noirs du futur un peu rude. Une nuit qui n'existe pas. Que l'on inscrit sur une liste. Le temps qui passe. Les regrets que l'on ressasse. Au rythme du plaisir que l'on casse. J't'assure. Sans amour, les mains filent plus beau. Caressent plus dur. Donnent plus sûr. Le coeur, qu'on arrache d'un mot. Quand le matin vient. Et que les draps sentent la torpeur. L'odeur de la peur. Le désir robotique me ronge l'ennuie. Seule au comptoir, j'avale mon verre. En commande un nouveau. S'engouffrer dans la nuit. Sans jamais prétendre un jour s'en réveiller. J'avale le comptoir sans sourciller. Les corps dansent autour de moi. Musique industrielle pour sueur sans chaleur.

Sixième service. Des bras enlacent mon corps. Je ne tique pas. Je ne sourcille plus de rien. L'ivresse m'ennuie. L'ivresse m'endort. Je suis sans savoir. Me laisse emporter sans rien dire. Ma tête cogne un peu contre les parois métalliques. Des bras me portent en rythme. Des mains m'attrapent et me rattrapent. Les yeux fermés, je me balance avec excès. La sueur d'un corps vide effleure mes joues. Mon coeur cogne sans fracas. Le désir automatique remplace l'ennuie. J'embrasse des lèvres. Avale la sève. Mords sans appétit dans un corps. Toujours aussi vide. Me balance avec excès. Toujours aussi fort. Le coeur sans fracas. Dans la poitrine presque ouverte. À battre sans répit. Toujours aussi mort. Moi aussi, j'aurais voulu pouvoir mourir dans ses bras. Moi aussi j'aurais pu sauter, tu sais.

mardi 2 juin 2015

[ MUSIQUE ] ALLER VOIR LA MER, PUIS SAUTER | Blancmange / Talk Tall / The Durutti Column / Soft Cell / Der Plan |


© Andrew Lu.
Parce que le vent a cela d'excitant qu'il ne dure qu'un instant. Parce que les amours ont cela d'éprouvant qu'ils ne vibrent qu'un court moment. Café noir, à vider d'un trait. Renverser le coeur, essuyer le liquide poisseux qui colle à la table, claquer deux s'condes du talon, puis revenir à soi. Revenir à soi après le grand saut. Celui qui n'porte jamais la poisse. Celui qui abîme un peu. Mais qui nettoie l'âme, les restants de l'autre, et tous les artifices. Un soir, le hasard, et s'envelopper des frissons de la nuit. Essuyer le liquide poisseux qui colle à la table. Qui colle aux chaussures. Aller voir la mer, puis sauter. Parce que les vagues ont cela d'excitant qu'elles ne tuent qu'un instant. Puis sentir le feu. Le feu qui consume la peau. Sentir le coeur exploser. Laisser les fleurs derrière soi. Les fleurs asséchées des nuits folles. Les fleurs mortes là sur le sol. Et se réfugier en haut d'un arbre. Un arbre fruitier. Laisser le vent caresser la peau molle, les branches craquer sous le poids, puis les chaussures, encore, qui collent. Le silence, et les pétales qui volent. La fin de l'errance, et les larmes sèches, là sous le voile.



samedi 2 mai 2015

[ TEXTE ] RÉTRO-FUTUR DU SENTIMENT | LES NUITS NOIRES ET LES INSECTES QUI CRAQUENT SOUS LA DENT

© Ren Hang.
Le bruit des autres ne me ramène à rien d'autre qu'à l'absence. Le vide qui remplit l'appartement. Les silences secs qui en plombent son sein. Il pleuvote sur la verrière et j'aimerais pouvoir glisser sur un carreau, moi aussi. Me laisser aller à la douceur d'une tendre descente. Et me laisser m'échouer, sans douleur, sans mauvaise montée, sur la tôle abîmée.  

"Il n'y a qu'une direction à la fuite tangible."

J'avale ma canette de Ginger beer, en me demandant qui me lira. Mon appartement est froid. Mal rangé. Je me demande sans arrêt ce que je fous là. Je pense à Londres, et aux rues album photo. Les paysages souvenirs. Les clichés d'amour. Le premier amour, celui qui pourrait tuer, qui revient, cinq ans après, presque en dansant. Parce que les odeurs retrouvées et le sentir d'une main, un peu trop proche. Alors évidemment, l'estomac qui se tord. Le coeur qui ne répond pas. Et s'attarde au mauvais endroit. Peut-être que si je n'aime pas, que si je n'aime plus, c'est que je ne le veux pas, puis que je n'le peux plus. Bon Dieu ces séries de réflexions idiotes. 

"J'en peux plus de moi."

J'ai entendu ça cette semaine. Je n'sais plus bien de qui. Mais je n'sais surtout plus pourquoi. D'où. Ni comment. Mais je l'ai entendu. Et je n'sais plus si j'en ai ri, ou si j'n'ai simplement rien dit. Le gingembre me pique le palais. Je n'sais pas bien si j'aime ça. Mais je bois tout de même. La douleur, le désir, du pareil du même.

La voisine hurle maintenant. Et les ouvriers, de l'autre côté du couloir, parlent fort, comme à leur habitude, sans jamais se soucier de qui les entend. Polonais. Roumains. Bulgares. Je n'sais pas bien. Mais je les déteste. Sans même les connaître ne serait-ce qu'un peu.

"Ces bêtises de saut dans le vide, un jour ça te jouera des tours."

Évidemment. Car il n'y a qu'en arrêtant de réfléchir que le bonheur peut nous gagner l'esprit. Ne serait-ce que quelques secondes. Drogues, alcools, sexes et délices de bouche en tous genres. Tous là pour la même raison. Pour nous faire oublier. Nous faire nous oublier. Soi-même et mutuellement. Et dans le miroir ne plus discerner. Ni ce qui habite. Ni ce qui quitte. Plonger sa tête dans un seau à glaçons. Mâcher du papier jusqu'à l'inertie buccale. Se gratter la peau et atteindre l'os. Frapper du poing le mur et peindre de son sang. Sur le sol, l'empreinte effacée, de nos rêves décharnés. Sur la porte, les dernières traces de l'espoir égratigné, mis en boule, lancé là comme par hasard, incapable de rebondir une fois de plus, trop tard, trop tôt, à ces histoires gâchées, pas toujours de fin mot.

"J'ai rêvé que je rêvais, je crois.., je crois bien que je disparais."

Je l'ai revue sur la bouche d'une autre. Dans l'accent, la façon de s'exprimer, les expressions et les petits plis qui lui apparaissaient au coin de l'oeil. J'ai revu l'amour, le premier, le plus fort, celui qui reste toujours, là, bien plié dans le fond d'un placard, puis que l'on retrouve, de temps à autre, quand la mélancolie nous prend, qu'il pleut, et que les verrières glissent sous la pluie. Qu'il fait un peu froid et que l'on se sent vide, pas forcément très intacte, un peu abîmée par les années passées, le souffle court, la poitrine qui cogne un peu contre les ciels gris et le silence ravageur. Je l'ai revue. Intacte. Belle comme le jour. Coquette et muette, évidemment. Le sourire grand, l'oeil pétillant, mon amour d'avant. Avant. Avant la nuit, et les insectes qui craquent sous la dent. Maligne, agile, le cheveux soyeux, brun comme l'ébène, la peau lisse comme la soie, se jouant de la vie, devant moi et mon coeur amoureux, encore une fois. Encore et encore, toujours, la dernière fois. 

Je l'ai revue, parce que je l'ai voulue, parce que je l'ai attendue, au détour d'une rue de brique rouge, je l'ai attendue, à la laverie, au restaurant chinois, devant la vitre et les dizaines de canards, accrochés là, comme par erreur. Je l'ai voulue, au sortir du métro, puis sous l'arbre, près des poules d'eau. Dans le sillage de la route, monter dans le bus, me croiser chez Tesco, je l'ai voulue, attendue comme un café fort du matin. Nécessaire, vitale, jouissive. Je l'ai revue, alors, dans mes yeux plein de buée, assourdis par les larmes, qui ne sortaient qu'handicapées. Malingres, pas forcément très sûres d'elles, misérables, fragiles, hésitantes, éternelles.. comme un amour qu'on oublie pas.

"Il n'y a rien de pire que de passer le temps."

J'éternue comme une enfant. Le gingembre me chatouille le nez. J'aimerais poser un patch sur ma poitrine. Pour les mauvais endroits, où je pose mes fesses. Les mauvais arrêts de bus, où je passe le temps. À attendre l'indésirable, à désirer l'impossible. Il n'y a rien de pire que de passer le temps. Simplement, sans attendre des jours qui arrivent l'explosion, l'excitation, le désir frénétique, les bulles légères qui éclatent sur la langue. Il n'y a rien de pire que de se contenter de ce que l'on a. Rien de pire que d'apprendre à apprécier les moments silencieux, les instants incertains, où rien ne bascule jamais. Rien de pire que de ne plus espérer, au coin d'une rue de brique rouge, croiser l'amour d'avant. Avant. Avant les nuits noires et les insectes qui craquent sous la dent. Avant. Avant la chute en avant, les idioties, les bêtes noires qui nous grimpent le long du coeur. La peau rongée, le sang vidé, toujours plus loin, toujours plus fort, ton front rouge de colère et la tête qui frénétiquement cogne dans tous les murs.

Il pleut encore un peu. Et j'ai l'étrange et désagréable impression, que cela fait des heures que l'on nous crache dessus.

jeudi 30 avril 2015

[ POP-UP ] Y'A DES HOLOGRAMMES PARTOUT

Y'a des hologrammes partout. De toi comme de moi. Des plus sombres que d'autres. Des qu'ont pas l'temps. Des qui crient fort. Puis d'autres qui s'assoient là, au hasard, par habitude ou besoin d'faire les choses à moitié. Besoin d'se remettre, deux s'condes, du temps qui passe et des rides qu'on ramasse. À la pelle. La trentaine à fleur de nez. Des hologrammes partout j'te dis. Par centaine. Le bras enfoui dans la mitaine. Coupé de moitié. Le coeur rassasié, un peu éteint. Des hologrammes qui flirtent avec les métros puant, qui écrasent tes chimères vibrantes, d'intellectuel pré-pubère. Des hologrammes par centaines, sur les rails errant. Certains à ton odeur. D'autres qui t'ressemblent un peu. Tous pas forcément posés dans l'sens de la route. Pas forcément parés face aux fausses routes. Celles qui disent rien. Les routes qui t'conduisent pas bien. Puis qui dévient dans la brousse. Dans la jungle des "j'en sais rien". J'pensais qu't'étais rousse. En fait. J'te voulais p-t être un peu douce. Je crois. Pas forcément à mon image. Mais à celle de c'que j'suis plus. Et j'me d'mande souvent. C'qu'on fait là. À s'poser des questions dans l'tas. À s'poser des "pourquoi ?" tout l'temps. Des "comment ?" de grands enfants. À la volée, lancées là juste pour le geste. Parce qu'il est beau, le geste. Parce qu'il tombe de haut. Brandi comme un couteau neuf. Boucher de circonstance. Bouché parce que trop plein. À s'en foutre plein la panse. En travers de la route. Même de celles qui dévient d'trop. À s'lancer des mots qu'on pense pas trop. Pour le test. L'expérience du plongeon. Le geste, j'te dis. Puis s'mordre les doigts. Parce qu'on a plus la foi. Juste quelques secondes. Où l'monde s'écroule. Pour trois fois rien. Parce que les regrets sont rois. Sur la basse terre des "j'en sais rien". La peur de pas r'trouver. Le cocon sein. L'sentiment, l'arrangement sur mesure, qui a fait BOUM dans l'bas du ventre. Et les estomacs qui s'tordent comme des connards. Les hologrammes à la pelle. Et tes corps qui s'emmêlent. Comme des silences qu'on digère mal. Comme des grands vides qu'on avale sales. Parce qu'on sait rien. Qu'on sait plus faire. Qu'on stagne dans la poussière des rêves qu'on a cru faire. Des sourires qu'on a presque esquissés. Des visages qu'on aurait voulu pouvoir dessiner. Mais on s'souvient plus bien. Parce que la nuit, les trous s'bouchent rudes. Par habitude. La bite dure comme l'enfer. Parfaitement accordée au papier peint qu'tu vois à peine. La chatte étouffée et les hanches qu'on serre. Parfaitement soignée la chorégraphie, la vision claire du moment, comme une apparition un peu glaugue, un truc fort qui fait qu'on s'perd pas vraiment. Qu'on s'récupère sur l'trottoir, au coin d'la rue qu'on connaît mais qu'on oublie. Dans la purée de nos envies maudites. De nos envies à gueule de rites. Baiser six minutes. Le temps d'oublier. Qu'demain chahute, à la porte de la culbute. Qu'demain s'ra gris, l'ivresse partie. On s'vomit les uns sur les autres. Les mains sur la poitrine d'une autre. À s'accrocher au bûcher des saltimbanques. Tour de Pise au soleil. Comme un corps branlant, à l'idée d'pas trop pencher. De pas trop vriller. Sous le feu étourdissant. Et les éclats de sang, sous les poings décharnés des ombres qu'on aime trop. Qu'on aime plus bien. Enfin on sait pas. On sait plus. On fait forcément rien. Y'a des hologrammes partout. Je danse sans musique. Parce que dans ma tête. Le souvenir de vos chants. Et les ombres que l'on ment. Les yeux fermés comme un mauvais amant. À baiser les murs tous bien en rang.

mardi 21 avril 2015

FUITE TACITE. CHUTE TRAGIQUE. [ LES AMOURS PARTAGÉS ]

exercice mardi 21 avril 2015 . 20 minutes d'écriture . 5 de relecture.


© Asger Carlsen.


Tu m'as dit que les fleurs me parleraient. Que je pouvais leur confier. Mes malheurs, puis mes tendresses. Leur faire part des failles, puis de mes trains qui souvent déraillent. De mon esprit qui s'égare quand le vent se lève. De mes larmes qui coulent un peu quand la mer s'agite. Tu m'as dit d'aller les voir. Parce que tu étais loin. Puis que tu n'savais quoi faire. D'un corps comme le mien. Triste et sensible. Tangible et tremblant. 

Mais le vent, tu sais. Quand il souffle, les fleurs s'enlisent. Et chuchotent avec entrain les délires des morts qu'on oublie. Le vent quand il souffle, ramène les cris des esprits perdus. Ceux qu'on a pendus dans la nuit. Puis ceux des enfants rompus par les coups. Fendus par l'amour. L'innocence du toujours. 

Le vent rend fou. Le vent rend saoul. Et mes larmes coulent déjà. Alors que la mer est calme. Je crois que mon cœur se fend sur la roche. En bas, vers le vide que je n'vois pas. Et mes souvenirs cogitent. Hors de moi. Mais pas si loin. Comme s'ils étaient quelqu'un d'autre. Une belle femme sans odeur que je placerais à mes côtés. Dont je me sépare à souhait. Et que je retrouve avec peine. Car les femmes ont cet odeur.. Le temps de me perdre un peu. Ailleurs. Le temps de fermer puis de rouvrir les yeux. D'y voir meilleur. Mais jamais je ne retrouve, l'enfant fendu par l'amour. L'innocence du toujours au plus doux des sourires. La pluie s'abat sur mon visage. Le vent se lève un peu. En bas, le vide. Et les mémoires de jour acides. 

En noir et blanc, tout est plus clair. Le sang qui gicle et les colères par cycles. La douleur mystique, nécessité en tissu de soie. Au quotidien des jours qui meurent. Au terrible maintien des nuits sans peur. En noir et blanc, tout a un sens. La lumière dessine l'ombre suggestion. Et la combustion des peaux, comme un arbre d'hiver agité par la pluie. De haut en bas. De droite à gauche. Cheveux fous, tête mal assise, arrachée à ses dépends, du tronc tour de Pise. Branlant, tremblant, mal seyant à la vie. Pissenlit d'herbe belle, vautour d'herbe folle. Le corps se pourfend, au vent qui abîme. Ou confirme, l'immonde finalité du sens. Le vide, et les falaises à pic. 

Dante. Pic de Dante. Lourde et condamnée, la descente. D'être montée si haut. Et si vite. Par la voie la plus express. Fuite tacite. Chute tragique. Des cœurs malmenés. Parce qu'il y en a plus d'un. Oui. Plus d'un pour qu'on sache. Que les cœurs s'agitent. Pour un rien. Et contre toute fin. Les mains s'agrippent. Les corps crapahutent. Sur les falaises à pic. Des Normandie tristes. Parce qu'il faut savoir. Qu'il y en a plus d'une. Oui. Plus d'une pour que l'on sache. Que les points de mer font miroiter. De pouvoir mettre fin. De pouvoir n'être qu'un. Les points de mer caressent l'idée. De pouvoir partir vite. Sans suite pratique. De pouvoir couper court. Au plus court de l'éternité. Sans sur hier s'arrêter. Les points de mer soulèvent les cœurs. Parce ce qu'il y en a plus d'un. Oui. Plus d'un pour mourir. Au calme et dans la grâce. D'une fuite tacite. Chute tragique. Souvenir explicite.

jeudi 16 avril 2015

[ THE POP-UP ] 6 H 57

© Nate Walton
6 H 57 - Les culottes frisent à la gueule des poupées qui s'emballent. Le soleil brille. Et tu vacilles. À travers les nuages salés des premiers jours d'été. Il est trop tôt. Trop tôt pour comprendre. Que l'soleil me troue la peau. Déjà. Et qu'j'ai un peu chaud. Là, accoudée au bar du coin cuisine, à faire claquer ma cuillère contre l'étain bleu. Y'a une heure j'étais dans mon bain. Non, ça c'était hier. Ou l'année dernière. Je sais plus bien. Je m'souviens mal. Je claque la cuillère en bois contre l'étain. Ça sonne. Je râle. Ça m'grince dans la poitrine. Ça me rebondit dans la tête. À réveiller les morts que j'ai là-d'dans. Les fantômes qui crient au vent levé. Les ombres émaciées. Depuis longtemps échappées. 

J'aim'rais bien pleurer. Tu sais. Verser des trucs qui pèsent habituellement. Me délivrer des p'tits poids qu'j'ai posé là pour muscler mon coeur. Pleurer, juste un peu. Déverser le trop-plein qu'j'ai dans les reins. Poser mes mains sur le carrelage froid. Et me voir enfin moi. Juste encore une fois. Pleurer et mouiller la surface. Sans pour autant être à la masse. Sans me dire qu'encore j'ressasse. Les vieux chiffons. Les brouillons sales. Ouvrir la valve. Quelques secondes. Comme pour vider d'ses dernières gouttes, un ballon d'eau chaude pourri par la rouille. Mais j'ai la trouille, tu vois, qui m'prend à la gorge, comme ça, tout l'temps. Et jamais j'm'y attends. Et ça coupe tout. Mes envies d'attendre. Mes fleurs au lieu des cendres. Ça coupe tout. Tout au plus court. Les tiges des nouveaux nés du printemps. Les élans de tendresse. Et la rance patience. J'aim'rais bien tu vois. Tout voir en rose. Les baisers que tu poses. Comme une lumière qui s'éteint pas. Voir le futur le coeur ouvert. Sans les murs. Et les éclats de verre dans la paume. J'aim'rais bien, tu vois, ne pas r'fermer ma main quand ils sont là. Ne pas m'baiser l'moral pour un tesson. J'suis un peu con. T'avais raison. Pardon, j'devrais faire gaffe. À ce que j'dis. Puis à c'que j'suis.

Les culottes frisent. Au balcon des bourreaux espagnols. Le soleil brille. Et tu vacilles encore un peu. À travers les nuages salés, des mes premiers jours d'été.

dimanche 5 avril 2015

[ RENCONTRE ] ADELINE / L'AMOUR FOU - FOUS D'AMOUR


"Pour qu'un amour soit inoubliable, il faut que les hasards s'y rejoignent dès le premier instant", disait Kundera dans Amour et hasard. Dans ce livre, sont également mentionnés "sexe", "désir", "sommeil", "territoire", "multiplicité des rapports" mais "amour unique". André Breton lui, voit en l'amour, la source, l'essence même de l'art, et son expression la plus profonde. "Je ne nie pas que l'amour ait maille à partir avec la vie. Je dis qu'ils doit vaincre et pour cela s'être élevé à une telle conscience poétique de lui-même que tout ce qu'il rencontre nécessairement d'hostile se fonde au foyer de sa propre gloire" écrit-il dans L'amour fou. Pour Malraux, ce sera la nécessité, l'expérience, et celui, invincible et indescriptible, d'une mère. 

Les amours sont multiples.


Nos amours sont MULTIPLEs. Intransigeants, parfois indécents, fragiles et solubles, vifs comme le vent, malingres comme la faim, carrés ou frappés, glacés ou tangibles, je n'ai assez de dix doigts pour mettre le doigt sur chacun d'entre eux. Ou faudra-t-il que je m'assoie à une table et me laisse porter là, à penser à l'un, puis à l'AUTRE, à pouffer et à rire, à pleurer et à dévisager le mur sur lesquels se reflèteront les vôtres. Il me faudra des heures. Des années. sans doute toute une vie, pour ne serait-ce que commencer à comprendre les miens. Alors dépiautons donc les vôtres. De temps à autres. 

J'ai donc décidé de piocher en vous. De creuser un peu. Du bout de l'index gauche. Gauche parce qu'il me faudra ici rester loin tout en étant là, à vous écouter vous épancher, parfois avec pudeur, souvent avec humour et finesse, et de temps en temps, avec volumes et gourmandises.

Pourquoi Adeline ? 

Parce que je suis toujours celle qui pose les questions.
Je me suis rencontrée plusieurs fois au cours de ma vie. Vingt-huit années, l'air de rien, c'est long. Long et laborieux parfois. Long et puissant souvent. Je me rappelle d'une fois en particulier. C'était janvier. Un début d'année comme un autre. C'était 2008. Et j'avais tout un tas de cascades devant et dedans les yeux. Je tombais dans un trou. Capable de me voir comme j'étais. Sans doute pour la première fois. Chaque chute ouvre la peau. Puis les fissures se comblent. Avec le temps. Mais le coeur n'oublie pas. Les coeurs n'oublient jamais. Puis novembre 2010, je me rencontre à nouveau. Deux amours de ma vie prennent le large. On en brûle un. Je brûle les photos de l'autre. Et je découvre l'existence de mon karma. Malingre et puérile, parfois. Soluble et terrible, souvent. Je le reverrai plus fréquemment, avec l'âge, et les mini rides qui m'ornent le front, un peu plus, chaque année. Je me suis rencontrée de nouveau il y a un an. Non pas au cours des 1680 heures passées au Vietnam. Mais au retour parisien. Dans la solitude. Et l'impossibilité de raconter. De partager à nouveau. 3615 ma vie. Je souris. Hâte de me revoir un jour. Qui sait. Peut-être demain. Ou dans quelques minutes.

ADELINE
/ 28 ANS - JOURNALISTE ET ÉQUILIBRISTE SUR MOTS /





L'AMOUR FOU, pour toi ça veut dire quoi ?

Il est difficile de répondre à cette question, car je crois l'avoir trop posée. Je me rends compte aujourd'hui de l'engagement que demande une réponse ici. De l'absence de pudeur que la question implique. Réfléchissons.

L'Amour Fou. Il est pour moi celui qui n'existe que dans les rêves. Quand on se couche. Que l'on ferme les yeux en pensant à ce que l'on aurait voulu dire. Voulu faire. Que l'on se laisse aller au sommeil, à la nuit, et que l'on prie, l'air de rien, pour trouver la force de changer les choses. Pour trouver la force de changer tout court, et d'accepter l'amour. Sa folie. Son intransigeance. Et sa force. Trouver la force de faire confiance. Malgré les embûches. Malgré les fissures que l'on sait pouvoir rouvrir, malgré les murs que l'on sait pouvoir casser. Et malgré soi, le pire, le plus redoutable ennemi, le soi.
L'Amour Fou, il est l'unique pour moi. La seule manière de vivre l'amour. Il est le coeur posé sur un plateau, suintant, mais vibrant. En dehors du corps. En dehors des pensées. Seul et impétueux, orné, protégé de quelques ondes électriques. Il est le corps battant malgré et contre tout. Il est la patience, et l'acceptation. La tolérance et le respect. Il est perfection tout plein de défauts. L'amour doit être fou, parce qu'il faut être complètement fou pour se jeter sur un câble en ferraille et jouer les équilibristes avec pour seule sécurité celle de s'éclater la gueule contre le sol en cas de perte d'équilibre..

Tu l'as vécu ?

Non. J'ai cru. Parfois. Pouvoir plonger dans ses eaux. Mais je plongeais seule. Et je nage (très) mal. Puis j'ai toujours peur de mettre ma tête sous l'eau. 

Des oeuvres ont bouleversé ta vision de l'amour ?


Sans aucun doute un livre. La Confession d'un Enfant du Siècle, de Musset. Il m'a amenée à apprendre à aimer et à haïr. Avec passion. Sans raison. Ce livre m'a sans doute appris à mal aimer, mais je ne regrette pas de l'avoir encore dans mon coeur. Puis un film, La Vie Rêvée des Anges, d'Érick Zonca. Pourquoi ? Ça c'est secret. Niveau musique, pas mal d'artistes ont changé ma vie à ce propos. Chacune de mes histoires d'amour est liée à un groupe, un album, une chanson. Il y a eu Talk Talk. Renée en particulier. Flock Of Seagulls. Une chanson d'Elvis, Always On My Mind. Puis Beach House. Wild Beasts. Une autre chanson, Crucify Your Mind, de Rodriguez. J'ai cru me briser le coeur plusieurs fois cet été là. Des trucs des années 80 que l'on ne nomme même plus. J'ai rompu sur un Goodbye My Lover une fois. J'en ris un peu maintenant. Mais toutes ces choses, cette musique à forte tendance dépressive, a définitivement modelé ma façon d'aimer, oui.




Et le sexe dans tout ça ? Tu le relies à l'amour ou pas forcément ?

Le sexe sans sentiments est un hobby. Le sexe avec sentiments, c'est la vie. 

Et le désir ?

Le désir, lui, il fait vivre. La seule et unique raison de se lever le matin.

Tu pourrais tomber amoureuse de.. toi-même ?

Ha ça non. Jamais de la vie. Enfin je ne crois pas. Je ne suis attirée que par mes "extrêmes contraires". Trop de points communs tuent le point commun. 

Bon et sinon tu fais quoi en ce moment ?

Je cherche de nouvelles piges Musique et Gastro. Je continue de faire manger des macarons et autres sucreries de luxe à de riches américains. Je commence à passer de la musique dans quelques bars et événements puis j'écris des textes à moitié surréalistes ici. Que je lis, parfois, devant des gens ? L'angoisse. Ha, puis je planche sur un livre que j'aurais du finir il y a deux ans et un autre que je viens d'entamer. Avec un peu de chance j'aurai fini tout ça avant mon.. quarantième anniversaire.


lundi 30 mars 2015

[ ÉVÉNEMENT ] L'AMOUR FOU FAISAIT LA SAINTE (VALENTINE)

Le 14 février dernier, histoire de bien planter ce jour si (non) spécial qu'est la Saint-Valentin, l'Amour Fou se faisait un méchant plaisir de s'allier au collectif CURI pour lire quelques uns de ses textes les plus absurdes et apocalyptiques. Depuis, les photos ont été tirées. Puis on en a fait notre sauce. Un truc qui tirerait plus vers le curry vert un peu aigre. Pour nos papilles contractées, désavantagées, et (trop) exigeantes. Vous nous avez ratées. Pourtant, chattes, pénis et minauderies métalliques étaient bien là pour illuminer la noirceur valentine. MINCE. Alors quelques clichés signés CURI, pour profiter de trois minutes d'égocentrisme mal placé, capter deux trois pinces d'esprit malin sur l'ambiance et vous rattraper adroitement (au vol) sur la funambule affaire créative.







© crédit +CURI Collectif  / FFF

[ THE POP-UP ]

I am blank. Les angoisses en collier. Bijoux d'humeur prêts à tomber. Nuits blanches mal habillées. Peignées même si le jour bien avancé. Le rimel qui coule. Comme des maisons en fumée. Le feu jaillissant des fenêtres. Exutoire pas très sain, pour corvée d'esprit sans lendemain. Comme la colère que tu as vu naître. Au bout d'un fusil. Et d'un cran mal assuré. Alors de toutes tes mains abîmées. Tu as parsemé la journée. D'un masque ciré à blanc. Blanc sans le sang. Le sang quand tu mens. L'estomac qui tourne qui tourne qui tourne. Le chemin sombre que tu enfournes enfournes enfournes. I am blank.

samedi 21 mars 2015

[ TEXTE ] DU PERPÉTUEL NON INTÉRÊT DE CE QUI EST ACQUIS


Les oreilles bourdonnent. Dans le sens des aiguilles d'une montre. Le frigo ronronne. Et la montre sonne. Comme à chaque heure. Chaque jour. Pendant peut-être 30 secondes. Peut-être moins, en fait. Elle vient de s'arrêter. Et je n'sais pas bien si j'ai tant compté.
SI J'AI TANT COMPTÉ. À se triturer le cerveau. À se le retourner dans le sens contraire des aiguilles d'une montre, pour le coup. Parce que compter dans le vide. Ça compterait autant que de ne pas compter dans les grandes lignes ?
SI J'AI TANT COMPTÉ. Les foutaises et les abréviations de coeur. J'éternue. Pollution satanée. J'éternue encore. Et je m'abrège le coeur. Histoire de me calmer l'horloge qui palpite. Là-bas, en haut, sur le mur. Et qui dit plus l'heure. Mais s'il pleuvra, là, sur ton p'tit coeur. Tic. Tac. Le bruit de l'amour. Et du jour. Qui s'attarde un peu sur toi. Puis sur toi. Sur toi aussi. 
Pousser des râles d'énervement. La collection maudite. Comme un mauvais rite. Histoire que rien n'fonctionne comme convenu. Histoire de n'pas trop se mettre un nu. On n'sais jamais. Sur un malentendu. J'aim'rais monter sur le toit. Et voir si je tombe bien. À pic. Comme sans aucun hic. Dans les quotidiens affamés des jeunes pousses que je côtoie. Je râle. Je sais qu'il faut que j'avale. Mais c'est plus fort que moi. J'ai plus la foi. J'me répète. Que c'est malin. La poudre de perlinpinpin. Puis je vomis. Quand plus personne ne regarde. Mais personne ne regarde jamais. Alors je vomis tout le jour. Transparentes fenêtres d'âme. Philosophies de comptoir qui foire. Y'en a marre. Du chocolat et des coeurs en forme de passoire. Des protections de tortues ninja. Des sceptres qui tranchent, un peu. Des jolis visages qui courent dans la rue. Puis de tout ceux que tu n'vois pas. À trop vomir dans la cuvette. 
SI J'AI TANT COMPTÉ. Je réfléchis. Au perpétuel non intérêt de ce qui est acquis. Dont j'use aussi parfois. Qui m'amuse, quand je le vois. Dans l'embrasure de la porte presque fermée. Ou presque ouverte. La bouteille de Volvic vacille. Je n'ai pas de chat, moi. Je crois que c'est mon imagination, qui encore une fois, me joue des tours. L'autre, bien posé dans l'entrejambe, qui me fait tourner en bourrique. Mimiques par milliers. C'est presque la demi-journée. Et je me sens demi-Journey.
SI J'AI TANT COMPTÉ. Je n'entends pas grand chose. Je crois que je suis sourde. Puis gourde, un peu. À me demander comment compter. Combien j'ai compté. Parce qu'on s'en fiche, du vent et des impressions par milliers. Sur les jours parfois doux, parfois amers, dont on se rappelle. Ce dont on n'se fiche. Ce sont des grandes marées. Celles qui percutent. Les sens. Puis les corps, si on est là. Se laisser emporter par la mer. Sans un bras pour nous rattraper. Sans une main pour, une dernière fois, nous aimer. Puis sentir le sel, et la terre qui s'éloigne. Pétrir l'inconnu, du corps qui s'abîme. À mesure que les vagues submergent. Et que les abîmes s'approchent. Recevoir les reproches. Une dernière fois. Les lancer à la volée. Aussi. Et s'engouffrer tête la première. Dans l'eau tourbillonnante. Minauder dans les rêves. Puis se lover dans l'oubli. La trêve. La sève même de l'existence.
SI J'AI TANT COMPTÉ. Je mâche mon chewing-gum sans courtoisie. Mon porte-manteaux a lâché hier. Une pile de manteaux brillants et vestes en tweed de pépé, s'entassent sur mon canapé couleur de vos vins. Je pourrais le ré-installer. Mais je trouve vain, l'effort qui anéantira peut-être ma journée. Le reste de ce qu'il reste à frémir. Ça pourrait être pire. Il me faut recettes et mets coquets. Parce que les repas dominicaux ont bon dos. Froid dans l'dos. Au fond. Les marchés à ne pas manquer. Et les semaines qui se referont suite sans jamais demander. Je suis sourde. Peut-être gourde. Et je me laisse aller quelques minutes. À tenter de percevoir les cris du gamin d'à côté. Rien. Je n'suis peut-être pas là. Au fond. Puis le ciel est gris. Peut-être que tout est fini.



jeudi 12 mars 2015

[ TEXTE ] RÉTRO-FUTUR DU SENTIMENT | LETTRE DE RUPTURE À PAIEMENT COMPTANT

© Stéphanie Schneider.
Chère toi, 

J'ai pas envie. Pas envie qu'tu m'aimes. Pas envie qu'tu m'souries. Qu'tu m'dises que la vie, tes nuits, le matin, tout ça, c'est tout pour moi. C'est trop pour moi. J'ai plus la foi. Tu vois. J'ai pas envie. Tu sais. Pas envie d'savoir que tout peut rouler. Comme sur des roulettes. Innocemment. Insensé. Roulette russe à la r'traite. J'ai pas envie de t'voir tout bas. Pleurer contre moi. Envie qu'tu m'aimes pas. Qu'à mes pieds tu t'rabaisses pas. J'te veux pas, tu le sais, sous mon talon qui s'écrase. Sous mon vide qu'tu paraphrases. Sous mes jupes, et mes murs que tu rases. 

J'ai envie. Tu vois. De l'impossible. Envie qu'tu m'pousses contre un mur. Que tout soit dur. Ton coeur. Et puis l'futur. Envie qu'tu m'maltraites. Envie qu'tu sois ma cure. Mon pansement sympa. Puis qu'tu m'oublies, pour trois fois rien. Puis qu'tu m'fasses mal, plutôt qu'du bien. Ne m'aime pas, non, arrête. STOP. Assurée, la défaite. Parce que j'suis pas faite, tu vois. Pour les envies à deux. Et les assurances qu'on paie comptant. Pas envie, tu vois. Des nuits qu'tu m'offres d'un air heureux. Pas faite pour qu'tu saches. Ni même pour qu'tu croies savoir. Que c'est moi, et personne d'autre. Que c'est moi et pas une autre. J'préfère te dire, que c'est ma faute. Tu vois. Les contrats sont salaces. J'préfère prév'nir. Que la machine est cassée. Qu'les jours d'après sont mal vissés. J'préfère savoir qu'tu riras, aussi. En lisant mes mots bêchés. Puis qu'tu t'diras, au fond, que j'suis vraiment vraiment perchée. 

J'suis déjà loin, tu l'vois, non ? Partie depuis longtemps. Pourrie même bien avant. Qu'tu débarques la fleur aux dents. Qu'tu veuilles de moi, pour le printemps. 

Parce que j't'ai pas aimée. Et que j'ai honte, un peu, de m'sentir effacée. De la surface. Et de moi-même. J'aim'rais bien jouer, à pile ou face. Ne pas r'gretter de n'pas t'aimer. J'regrette pourtant. De m'sentir partir. Comme ça, pour trois fois rien. Effacée d'la carte. Gommée à jamais. Parce que les 'toujours' en travers. Et la gorge pleine de nerfs. Tu vois, pour trois fois rien. Toujours les mêmes envies de rien. L'amour est chien. J'essaie d'pleurer. Même ça, j'y arrive pas.

J'voudrais qu'tu m'serres. Sans tendresse. Parce que ça presse, tu sais. Et que j'meurs un peu. Quand tu m'aimes trop. J'voudrais qu'tu prennes au cou. Puis qu'tu t'agrippes. Que tu t'agrippes. Et qu'tu lâches rien. Qu'tu laisses ton poids baiser mes maux. Que tu m'laisses moi, rayer la nuit. D'un trait bleu roi. D'un verre bien mal servi. J'voudrais qu'tu m'fuies, aussi. Qu'tu saches toute ma colère. Qu'tu saches que tu me perds. À m'serrer trop doux. À m'baiser trop mou. J'voudrais juste qu'tu saches quoi faire.

J'ai plus la foi, tu vois. De te dire que j'ai plus mal. De plus savoir l'air que j'avale. Et de plus r'ssentir les balles. Quand tu m'engueules. Et qu'tu t'sens seule. J'voudrais qu'tu cries. Un peu. Enfin très fort. J'voudrais qu't'ailles chercher. Dans tes tripes encore bleutées. La force de m'éviter. 

La pluie m'tombe plus dans la nuque, tu vois. Je sens plus rien, tu vois. Ni le feu. Ni la glace. Ni ton reflet dans la glace. Ton ombre dans l'miroir. Quand on s'endort, et qu'il fait noir. J'te sens même plus, quand tu te couches. Que tu m'parcours de baisers froids. Je frisonne plus. Quand tu m'enlaces. Et qu'on danse non sans effroi. Sans l'obscurité qui étouffe. Même quand tu ris, je sais plus bien. Je sais juste que j'sais plus rien. 

Ne m'en veux pas. Je te vois plus. Je te sens plus. Je voudrais disparaître, et toi avec. Je suis un monstre. Ha oui. Tu crois ? Juste. Juste, j'veux plus qu'tu m'reluques. J'voudrais qu'tu m'voies. Que tu m'rencontres. Encore une fois. Qu'on s'connaisse pas. Puis qu'tu m'défonces. La tête et l'estomac. La main toute pleine de ronces. Au lieu d'm'embrasser et d'me promettre. À l'arrachée, des projets trop liquoreux. Barre toi donc, avec ton air heureux. Et tes croyances toutes pleines de noeuds. J'voudrais qu'tu saches que j'suis pas bonne. Que tu m'arraches le coeur. Si j'en ai un. Que tu m'frappes un peu, avec vigueur. Là, sur la joue, quand j'fais la moue. Que je me moque. Que j'te provoque. J'préfère qu'tu saches. Que c'est ma faute, pas celle d'une autre. Tant que j'le peux. J'voudrais qu'on sonne le glas. Aussi. Parce que t'as pas l'air de comprendre. Parce que j'suis lasse, de t'expliquer, que j'suis plus là. Que tu me parles, mais qu'j'entends pas. Que j'suis pas faite pour toi. Ni pour tout ça. J'suis faite tout court. Pas pour l'amour. Enfin l'brutal. Celui qu'est court. Et les vents sourds. Oui, les vents sourds.

Diane.

lundi 9 mars 2015

[ MUSIQUE ] RETRO-FUTUR DU SENTIMENT #paris | SOME MINOR NOISE / CHELSEA WOLFE / THE SOFT MOON / VOTIIV / LA FÉLINE |

© Sonya Kydeeva.
Paris, tu raisonnes comme une mauvaise blague. Sur les enceintes presque éteintes des trottoirs qu'on arpente. À nous faire collectionner des histoires un peu vagues. À mettre ton doigt dans la fente. Un peu trop souvent. Un peu trop souvent à nos dépends. Petit chenapan. Les histoires un peu vagues. Juste le temps d'ouvrir et d'fermer l'oeil. De lire à peine, de r'fermer l'écueil. Pas l'temps d'mourir comme un martyre. Plus l'temps d'périr dans un écho. Parce que tout est faux. Dans tes rues qui sentent la pisse. Les amours sans coeur, qui s'enchaînent sans chaleur. Les fronts que tu plisses, à détruire nos candeurs. Puis, les larmes sans peur, que tu coupes au couteau. Pourquoi donc faire face. Le sexe est là, en bon rapace. Pour faire mine de rassembler ce qu'on efface. De réparer tout ce qui casse. Il paraît qu'c'est beau. De s'aimer de quelques mots. Moi j'aime bien ça. Enfin, je sais plus bien. Si j'aime. Si j't'aime plus bien. Trois p'tites minutes pour oublier. Le temps d'une chanson. Le temps à faire passer. Le temps de faire passer, le gris et la sal'té. De ta machine encrassée. De tes coeurs séchés. De tes chimères, de tes étoiles rafistolées. Paris, blasée, blasée.

Paris, tu sonnes faux. Paris, t'as tout faux. Au début. Puis à la fin. La fin, surtout. Quand on se cherche les poux. Quand le matin, tu m'ôtes la faim. De chair, de fraîcheur et de corps amants, de coeur jeunes et d'"encores" vibrants. Les rues se montent à la chaîne, se descendent avec peine. Les bouches s'agrippent légères, se détachent lourdes comme la mort. J'pensais qu't'étais fort, tu vois. J'pensais qu'j'avais tort, tu vois. De t'cracher dans la gueule. Mes barres en fer. Métal à faire plier. Bétail à faire crier. Paris j'ai vu l'futur, et y'avait plus d'place pour nous. Paris on est nus. À t'branler le coeur tremblant. Paris, j'perds le fil. Quand la route défile. Ça va trop vite. Ça va trop fort. On perd le Nord, et toi tu ris, en bon cador. Paris j'vomis.

Paris, tu sonnes faux. À tout couper, coke et point levés, pénis tendus et chattes avalées. Il crie fort, l'enfant du Nord. Il crie fort parce qu'il a tort. Peine perdue, hurle à la mort. Corps pendu, file vers l'aurore. Enfant perdu. Pieds et poings nus. Coeur baisé, sur le sol traînant. Peau et veines arrachées. Il file droit, regard baissé. Titube à peine, rêve de grands espaces. Pas d'histoires salaces. Non, plus d'histoire salaces. Mots et peines arrachées. Petit bout par petit bout. Tu devenais fou. À m'regarder compter les fissures. Petit bout par petit bout. Tirer sur la corde. Compter sans s'arrêter. Tant qu'il y'a encore du mou. Dans la corde à noeuds des fêtards haineux. Puis, ne plus rien compter. Et ne plus compter tout court. Paris, tous les soirs, tu fais feu. Filet de sang sur la chaussée, c'était donné. À chausser nos rêves de poudre à canons. Ainsi fon fon fon. Nos marionnettes en chiffon. Haillon luxure. Au fur et à mesure. À l'intérieur tu meurs encore. En larmes, jamais, tu fonds. Froid comme le givre. Paris t'es rond. Paris t'es con.

Paris, j'vomis dans ma bouche. Parce que j'ai pas appris, à t'gérer sous toutes tes couches. Parce que j'ai pas compris, pourquoi t'étais aussi farouche. Pourquoi tu prenais la mouche. De m'voir me mettre la tête dans l'foin. Partir en courant, après avoir mendié. Me taire comme un enfant, après avoir fauté. Me mettre la tête dans le foin. Toujours trop loin. Mais jamais bien loin. De ce qui pique. De ce qui grince. Mince. Paris, si tu savais. J'avais mes pics, avant. Parfois deux trois "hics", pendant. J'claquais mes centimes, le neuf flambant. Dans les ch'veux des filles. Pour qu'elles sourcillent. Et m'laissent claquer les portes. Un peu trop vite. Toujours trop vite. Jamais bien loin. Des peaux arrachées. Des mots avalés. Mais Paris tu sais. Y'a tout qui s'réveille. Dans les corps défoncés. Y'a tout qui r'vient, un jour, aux esprits animés. Paris, tu sais. Quand la nuit t'emporte. T'as l'no-limit à fleur de fusil. Tu prends l'amour pour rite. Quitte à c'qu'on te quitte. Toujours pour rien. Jamais bien loin. De c'qui abîme. De c'qui décime. Ta tête dans l'rétro. Tu sais Paris, quand tu t'enfonces dans la nuit. T'en fais toujours un peu trop. La rose aux dents. La bouche en sang. 

lundi 23 février 2015

[ TEXTE ] RÉTRO-FUTUR DU SENTIMENT / 2287 #2

© Jacob Aue Sobol.
[ parce que nous ne sommes d'ici, que pour là-bas, avant comme hier, des fantômes de ce qui sera, des ancêtres de ce qui a, un jour, été. Par ici comme par ailleurs, ton regard à travers l'opacité vaporeuse, comme un élixir de déjà-vu. Pour ici comme pour ailleurs, rien ne sera comme il a, un jour, été question de se retrouver. Tout s'enchaîne. Tout se fait suite. Inconsistance du temps qui passe. Tout se ressemble, et s'assemble dans nos dos décharnés. Tout se démembre. Le futur est dur. Et file plus vite qu'avant. Nos amours sont les mêmes. Fragiles. Immoraux. Sans limites. Absurdes. Sans réalité. Ni sécurité. Par ici comme par ailleurs, ton regard à travers l'opacité vaporeuse, comme un élixir de déjà-vu. ]

| lire le début ici —> 2287 #1 |

 2287 #2

Je l'ai prise contre moi. Serrée comme si c'était la première fois. Ressentie comme si c'était la dernière fois. Le temps s'est arrêté, je crois. Et j'aurais pu mourir. Enfin. Là. Dans ses bras. Parce qu'elle était tout ce que j'espérais. Tout ce que j'avais jusqu'à ce jour, aimé. Et que sa seule chaleur. Et ses humeurs nébuleuses. Je le savais, pourraient braver tous mes vides. Mon coeur congelé. Sa patience, ma peau glacée. Son indécence, mes yeux fermés. Son étrangeté, ma vie abîmée. Je l'ai prise contre moi. Ressentie comme en été. Quand le soleil vient sublimer la beauté de son grain. Je l'ai serrée fort. Comme contre la mort. Parce qu'on sait bien que l'autre ignore. La violence du coeur qui transpire. Serrée comme en été. Comme si je l'avais un jour aimée. N'ayant plus jamais peur du meilleur, puis même du pire. Laissant sa tête sur mon épaule. Se taire dans l'éternité. Et la fumée de sa cigarette, dans le silence, nous envelopper. J'ai tremblé un peu. Quand sa main s'est posée dans mon cou. Habituellement, je ne l'aurais pas laissée. Mais je la savais observer ma peau striée. Et désirer l'instant. Dans le silence craquant et l'immensité. Son doigt caressant ma clavicule, quelques secondes. J'ai tremblé. Ne la voyant toujours pas. La devinant me caresser du regard. Puis j'ai fermé les yeux. Encore et encore. Son étreinte, plus douce que le vent. Plus salutaire que l'oubli. Juste un moment, un court instant. Où je n'sais plus bien qui je suis. Mais ses lèvres dans mon cou. Et mes veines gorgées de sang. J'aurais pu mourir, pour rester là plus longtemps. Juste quelques secondes. Où l'étreinte plus douce que la colère, guérit l'ennui. Et le mortel dégoût de vie. Rester là dans ses bras. Ses lèvres dans mon cou. Me parsemer de baisers de soie. Et laisser le temps m'abattre. Parce que ses bras. Et ses dents qui croquaient alors dans ma chair. Et plus aucun vide dans lequel plonger. 

Puis. Automatismes de mauvais trip. La douleur du contact. Réalité préméditée. Claque bien méritée. Vice enfin salué. L'alcool me secoue les tripes. Et sans avoir jamais voulu la laisser. J'ai disparu.

J'ai laissé derrière son visage hermétique. La fumée de sa cigarette. La tristesse plastique d'un rapport presque automatique. Sans tact ni pratique. J'ai senti mon coeur stopper sec. Et sans jamais avoir un seul moment voulu la lâcher. J'ai laissé son corps sombrer. Sans vanité. J'ai disparu. De côté, mon désir amer. Derrière, la chaleur et l'Océan qui fait rage. TIC. L'horloge dans le hall blanc. Pas un chat. Pas un sentiment. Mais les ombres noires. TAC. Mes démons, là, alignés devant moi, tous bien en rang. Ma figure rouge-sang dans le miroir. Mes yeux noirs. Et mon sexe qui me remonte encore dans la gorge. Les ténèbres environnantes. Mon corps qui roule. Qui roule. Sur le sol en pente. TIC. 2287. Nos amours futurs. TAC. Année machinale. Je cours. Dans le noir. Les escaliers dans la rue. Je dévale. Et la nuit, qui avale.

Mon pas sur la glace. Brut. Acerbe. Le futur est rude. Et je marche sans m'arrêter. Tentant de communier au passé. Je trottine sans me retourner. Sur la douceur instantanée. Qui pendant quelques minutes, m'a submergée. Je l'ai laissée caresser ma peau. J'ai risqué l'impossible. Je secoue la tête. J'aurais du tout arrêter. Ne pas me laisser aller au faillible. Prendre le temps de tout briser. Mais. C'est que je crois que ses lèvres étaient rouges. Rouge pourpre. Je réalise qu'il pleut. Que j'ai oublié ma veste là-bas. Chez elle. Au 77e étage du rien. Et je me rappelle alors avoir aperçu ses lèvres. Quelques secondes. Dans la confusion cireuse de sa fumée de cigarette. Alors que son index inspectait ma surface. Et que je me laissais aller à la mélancolie de l'abstrait. Ses lèvres rouge pourpre. Je les vois maintenant. Je l'ai vue. Elle. Mon coeur fait un bond. Et ma peau qui s'ouvrait, ma sève, mon sang, qui pour un instant, lui coulaient dans la bouche.

Le front plissé de réflexions stériles. Je m'arrête devant la porte couleur acier du Silex. J'ai le coeur un peu coulant. Les basses du club viennent faire trembloter le métal brûlant. Il pleut toujours. Je frissonne. Et rêve d'une bière. Peut-être que j'ai froid. Machine de guerre, j'ai du marcher pendant deux heures. Sans me retourner même une seule fois. Sans tact ni pratique. J'ai disparu sans lui dire un mot. Et mes démons, tous bien rangés, dans la poche plissée de mon égo impérieux. J'ai parcouru ces kilomètres sans même ouvrir les yeux. Pour me stopper net devant la porte du Silex. Les coïncidences ont la vie dure. Il pleut froid. Le futur empoisonne. Le présent m'est loin. 2287. Il pleut. Je dois être tout froid. Mais je relève le menton, sort mon paquet de Lucky. Trottoir d'en face. Une silhouette, capuche baissée, marche d'un pas mal avisé. Je le rattrape d'un geste. Ou d'un mot. Je n'sais plus trop. Lui demande du feu. Toujours de loin. Je n'vois pas son visage. Mais il parle et vient alors heurter mon périple humanoïde. Je pourrais le tuer. Pour avoir été là. "J'aurais voulu que tu meures dans mes bras". Je fronce le sourcil. Je n'le vois toujours pas. Je n'sais plus trop si je suis moi. Je secoue la tête. Il a disparu. Je me détourne. Le futur m'emmerde. Et le présent m'est loin. Cigarette allumée, je pousse finalement la lourde porte du club. Je m'arrête un instant. Repense à ses lèvres rouges. La couleur pourpre. Ses dents dans ma chair. Ma chevalière vient claquer contre l'acier. Le futur est rude. Bien plus dur qu'il n'y paraît. Je secoue la tête à nouveau. Mon désir robotique remplace l'ennui.